Quelle est l'origine des noms de ferme qui se trouvaient sur le territoire du quartier du Bourny ? Si dans les années 1970, il y avait 12 fermes sur ce qui sera le «Bourny», un siècle plus tôt, on en comptait plus d'une vingtaine.
Beaucoup de toponymes se terminent par le suffixe -ière (le plus usité) ou -erie (celui-ci est hérité du suffixe latin -aria qui signifie à peu près «propriété de ...»). Ces formations de noms de lieux très fréquentes vient du développement rapide de la propriété individuelle dans le Maine, au Moyen-Age, au cours des XI ème et XII ème siècles; époque à laquelle les défrichements permirent la création d'un grand nombre de fermes et de domaines.
Ainsi «la Guiardière» serait la propriété du « sieur Guiard»; «la Biennerie» doit probablement son nom à Mathieu de Biane (de Biana), chanoine du Bourg-Chevreau.
«La Bessonnerie» qui s'appelait la Bessonnière au XVII ème siècle, appartenait au seigneur de Rouessé. A l'origine était-elle la propriété d'un dénommé Besson ou bien une référence à un terrain bas ou un pâturage; Besson veut dire aussi : jumeau?
Lorsque l'on regarde les recensements effectués entre 1872 et 1901, on s'aperçoit qu'un même lieu porte un nom différent : ainsi, avant de voir apparaître «le Bourny», trouve-t-on «la Bournil» puis «le Bournil»; «la Guiardière», «les Guiardières» ou «les Guyardières»; pour «la Houdauderie», «la Houdaudière » ou «la Hunauderie»; pour «la Layerie», «l'Aillerie», «la l'Aillerie» (Ce nom du lieu vient du bas-latin aliara (= endroit où pousse l'ail); il s'agit probablement, en l'occurrence, d'ail sauvage); «la Saucinière» a pu s'écrire «la Saussinière» (les sauces provient directement du latin salix : salicis (= saule). Le nom de l'endroit signifie les Saules ou la Saussaie. Un ancien bois de saules aurait été défriché pour laisser la place à des champs et à un village de cultivateurs. Le saule est un arbre qui croît dans les lieux humides, ce qui donne une idée de la nature du terrain sur lequel se sont élevés les premières maisons.); «la Libergère», «l'Hibergère» et même «l'Ihibergère», pour «la Croslière», on trouve «la Craulière» ou «la Crollière», ...
D'autres noms de lieux ont une origine animale, végétale ou minérale. «La Chevrie» paraît devoir son nom à une ancienne chèvrerie, (= bercail aux chèvres). «Le Cormier», du Gaulois corma, doit sans doute son nom à un arbre le cormier ou sorbier domestique (Sorbus domestica) qu'on rencontrait dans le centre et l'ouest. Il était cultivé pour ses fruits, les cormes, ressemblants à de petites poires, que l'on mangeait blets ou secs. Les Romains les faisaient fermenter pour en tirer une boisson ressemblant un peu au cidre. La coutume s'est prolongée jusqu'au XVIII ème siècle, époque à laquelle les cormes faisaient l'objet d'une cueillette attentive. On dit que, séchées ou pulvérisées, elles étaient mélangées à la pâte du pain, surtout au cours des disettes. On appréciait aussi les vertus médicinales des cormes. «La petite Lande» : dans la France rurale du Moyen-Age, on nommait landes des forêts non entretenues et couvertes de broussailles; dans certaines régions, le mot désignait aussi une terre pauvre et inculte où croissaient ajoncs et bruyères. «La Loge» : on appelait loge une hutte ou une cabane couverte de feuillages qui constituait une habitation temporaire pour les bûcherons, les défricheurs de forêts. On désignait aussi sous ce terme de petits édifices précaires construits par des cultivateurs pour abriter certaines récoltes ou du matériel agricole.
L'origine de certains n'est pas facile à déterminer, ainsi pour Rouessé, on trouve plusieurs explications. Laquelle est la bonne ? Mot d'origine gallo-romaine : nom de lieu représentant un gentilice (= un nom de famille) : Roscius. Ferme à Laval; au XI ème siècle, Ruxiaco. Plutôt qu'un nom d'homme Ruscius, l'abbé Angot y verrait ici un lieu planté de ruscus, dans le sens de « roseau ».
«La Maison-Neuve» : neuve (= nouveau). Pas forcément à prendre au pied de la lettre, ce toponyme peut évoquer une maison récemment construite mais, souvent, il vient du latin mansio (= gîte d'étape, relais). Plus tard, le mansio devient un gîte d'étape dans lequel les voyageurs pouvaient se restaurer, changer de monture ou passer la nuit. Les mansiones étaient placés à une journée de voyage l'un de l'autre soit 45 km; l'on trouvait aussi des mutationes, relais permettant de changer les chevaux tous les 9 à 12 km.
Texte de l'exposition "Mémoires d'un quartier : le Bourny avant le Bourny"