Dans les années 1959/1960, l'usine Chesterfield s'installe dans la nouvelle zone industrielle de la Bouverie. La ville de Laval se chargera de faire construire les bâtiments qui seront mis ensuite en location-vente à la société. La société Chesterfield revendra cette usine en 1965. A suivre les délibérations du conseil municipal :
1959 : Chesterfield
S53-U-B1 Vu pour être annexé à l'arrêté en date de ce jour. Laval, le 18 juillet 1959 Pour le Préfet, le chef de bureau délégué Filoche
Industrialisation de la ville – Demande des établissements Chesterfield
« M. Hunaut, rapporteur de la commission, donne lecture du rapport suivant :
M. le Maire fait à la commission l'historique de l'affaire « Chesterfield ».
Les usines Chesterfield installées à Boulogne-Billancourt fabriquent des bas de nylon et, sous la marque « Lanvin », des lingeries fines ; affaire sérieuse appelée à prendre un certain développement.
M. Gadol, dirigeant de cette firme, pour diverses raisons, accepta de décentraliser son industrie à Laval, avec le projet d'y grouper ultérieurement les trois usines qui lui appartiennent.
Nos collègues pourront utilement reprendre la délibération du conseil municipal en date du 13 juin 1958 qui résume bien la question. La ville a rétrocédé aux établissements Chesterfield le terrain dit « la Bouverie » dans les conditions précisées par la délibération.
Mais tout dernièrement, M. Gadol fit connaître à la municipalité qu'il était en pourparlers avec une maison allemande pour essayer, dans le cadre du marché commun, de lancer en Europe une affaire non plus de bas traditionnels, mais de bas sans couture, ce qui nécessiterait pour l'usine en question une nouvelle mise de fonds et de nouveaux investissements.
L'affaire ne se conclut pas avec le groupe industriel allemand et M. Gadol décida de la reprendre à son compte exclusif, sur des bases plus modestes. Nous vous donnons d'ailleurs lecture de certains passages de la lettre qu'il adressa à ce sujet à M. le Maire :
« Paris, le 6 mai 1959
M. le Maire,
Conformément à notre promesse nous venons vous rendre compte de l'issue de nos tractations avec le groupe industriel allemand concernant nos projets d'installation d'une usine de fabrication de bas sans couture :
1) Du fait de l'intransigeance des Allemands mettant comme condition sine qua none l'installation de la future usine qui, nous vous le rappelons, devait grouper 180 machines de bas sans couture, à Strasbourg, pour profiter des avantages accordés aux zones dites critiques, nous avons décidé de refuser les propositions allemandes et interrompu nos pourparlers avec ces derniers.
Cependant, si nous trouvions une aide du point de vue de la construction nous accepterions volontiers, sur des bases plus modestes, de transférer nos propres ateliers de fabrication de bas sans couture de Boulogne-sur-Seine à Laval.
Nous vous rappelons que l'installation d'une industrie de bas n'a jamais été prévue ni même envisagée à l'origine. Seul le transfert de notre activité en matière de lingerie l'a été et dans nos projets, et dans le dossier approuvé par le M.R.U. et le ministère de l'Industrie et du Commerce.
2) Il s'agirait d'installer à Laval, 70 machines pour fabrication de bas sans couture, dont le transfert à Laval pourra se faire : 48 machines en septembre, 22 machines jusqu'à la fin de l'année. Il s'agit de matériel d'importation d'Angleterre et d'Italie que nous venons de recevoir et dont les dernières machines seront réceptionnées par nous entre septembre et décembre.
Le personnel nécessaire pour desservir ce matériel est de l'ordre de 5 hommes et 75 femmes.
3) Il s'agit bien entendu d'une industrie n'ayant rien de commun avec celle de la lingerie pour laquelle nous avons dans l'usine provisoire déjà formé une cinquantaine de personnes, les 50 à 100 personnes complémentaires que nous devons encore former d'urgence devant chaque jusqu'à terminaison des premiers bâtiments neufs rester dans l'état de projet par manque d'emplacement.
C'est par conséquent en complément et non pas en superposition de notre programme actuel que pourra être faite l'installation d'une industrie de bas sans couture, industrie appelée à un grand avenir, puisqu'elle sera la première et unique dans toute la partie ouest de la France et que le bas sans couture est destiné à supplanter le bas avec couture dans de très fortes proportions, d'où nos projets avec le groupe allemand.
4) Si la ville de Laval acceptait de reporter sur la société Chesterfield la confiance et les avantages accordés au groupe allemand et ceci pour une somme approximative de 15 millions de francs à la place des 50 millions de francs promis au groupe allemand, la construction de 2 sheds* supplémentaires représentant 600 mètres carrés pourra être immédiatement décidée et les commandes afférentes à ces deux sheds complémentaires passées dès le lendemain de la décisio que le conseil municipal voudra bien prendre à cet égard.
Cela porterait, les bâtiments actuellement commandés étant de l'ordre de 1.400 mètres carrés, le total de la construction à 2.000 mètres carrés environ. ... »
[*Le shed (XIXe siècle, anglicisme) est la toiture en dents de scie avec un versant vitré sur sa longueur, couvrant en général un atelier industriel. ]
Votre commission a longuement étudié cette question. La ville doit-elle refuser toute aide matérielle aux industriels s'implantant à Laval en dehors des terrains ? doit-elle, au contraire, adopter cette formule toute nouvelle lancée en France qui consiste, pour les villes, à construire des bâtiments industriels après les avoir financés d'une manière ou d'une autre et à les rétrocéder aux industriels s'implantant sur leur territoire, avec une formule de location-vente ?
Le problème posé devant votre commission fut résolu par l'affirmative. A époque nouvelle, méthodes nouvelles. Nous sommes tous d'accord sur le fond du problème, il faut industrialiser la ville. Il nous faut des milliers d'emplois masculins et féminins. Et voici une proposition qui s'offre à nous aujourd'hui ; elle est séduisante en ce sens qu'il s'agit pour la ville d'une opération blanche, pratiquement sans risque.
Aussi, votre commission, à l'unanimité est-elle d'accord pour vous faire les propositions suivantes :
La ville accepte de construire pour Chesterfield jusqu'à concurrence d'une somme de 15.000.000 de francs deux sheds de la future usine. Elle sollicite de M. le Préfet l'autorisation de traiter de gré à gré avec les entrepreneurs constructeurs de l'usine, par dérogation aux règles de l'adjudication, compte tenu du fait que les usines Chesterfield ont obtenu pour la première tranche construite par elles, des prix très serrés, prix que la ville ne pourrait pas même obtenir avec une adjudication. Ces sheds seraient construits sur un terrai rétrocédé à la ville par l'usine Chesterfield (plan joint au dossier).
La déclaration d'utilité publique est sollicitée pour cette opération.
M. le Maire serait autorisé à contracter près de tel ou tel organisme l'emprunt nécessaire (les délibérations réglementaires sont jointes au dossier). Le contrat à passer avec Chesterfield prévoirait dix annuités de remboursement à un taux calculé en fonction du taux d'intérêt de l'emprunt qui sera consenti à la ville. En d'autres termes, le contrat à passer avec Chesterfield assurerait pour la ville en capital et en intérêts une opération équilibrée. La vente du terrain serait faite sous condition suspensive afin qu'elle puisse être annulée dès que les usines Chesterfield se seront libérées de la dette contractée vis-à-vis de la ville.
Mes chers collègues, nous avons aujourd'hui une certaine satisfaction à formuler une telle proposition. Comme vous le voyez l'opération n'est pas mauvaise pour la ville et nul ne peut nous reprocher de l'avoir ainsi engagée, car, à terme, elle est rentable.
Laval, au centre d'un quadrilatère, Nantes-Angers-Rennes-Le Mans, dont les angles constituent des cités en plein développement économique, dans lesquelles de très importantes usines s'implantent, doit devenir en quelques années une ville industrielle de belle importance.
En ce qui me concerne, j'en formule le vœu, je m'en réjouis pour mes jeunes concitoyens et je vous demande, mes chers collègues, de vouloir bien approuver les propositions de votre commission.
Me Ferru : 1) S'il y a une location-vente, pas de difficultés fiscales.
2) Si au contraire la société revend une parcelle de terrain à la ville de Laval nous verrons l'administration de l'Enregistrement réclamer un droit d'enregistrement à Chesterfield.
3)La ville de Laval achetant le terrain, construisant et disant à la société : « Vous nous paierez dans un délai de 10 ou 15 ans. Si vous manquez à vos engagements, nous serons propriétaires de l'usine et du terrain. »
M. Henry : La vente à condition suspensive, c'est vraiment la solution juridique la plus simple et la meilleure. L'objection qui est faite par M. le Préfet, c'est qu'en cas de carence de la forme, l'affaire peut être constituée en tribunal, il n'y a aucun contrat. M. le Préfet craint qu'en cas de carence le droit réel soit discuté et que cela traîne un peu.
M. le Maire : En définitive, il faut accepter le rapport présenté par M. Hunaut avec la considération suivante : le maire va consulter la préfecture pour trouver la meilleure solution.
Le rapport est adopté. »
S53-U-F4 Demande des établissements Chesterfield
« Monsieur le Maire expose ce qui suit :
L'installation à Laval des usines Chesterfield est très certainement un succès.
Je vais prochainement vous demander de vouloir bien autoriser à nouveau la construction de 4 autres sheds et de les rétrocéder à Monsieur Gadol en location-vente, ce qui représentera pour la ville une dépense de 30 millions ; ce dossier vous sera certainement présenté dans le courant du premier semestre 1959, mais il faut financer ces 30 millions et nous avons aujourd'hui la possibilité de les emprunter à la société d'assurances « la Séquanaise », au taux de 6,35 %, remboursables en 10 ans.
Je vous demande de vouloir bien m'autoriser à emprunter ces 30 millions utilisables à bref délai, étant entendu que je ne réaliserai cet emprunt que lorsque vous-mêmes aurez approuvé la demande ferme des établissements Chesterfield, c'est-à-dire courant octobre-novembre, très certainement.
Mais il est nécessaire que nous prenions une position immédiate quant à la réalisation de cet emprunt.
vous trouverez jointes au dossier les délibérations réglementaires.
Le rapport est adopté. »
1960
S56-U-E7 Usine Chesterfield
Vu pour être annexé à l'arrêté en date de ce jour Laval, le 3 février 1960
Pour le préfet, le chef de bureau délégué Rousset
« M. le Maire donne lecture de l'exposé suivant :
Mes chers collègues,
Permettez-moi de vous entretenir maintenant le l'affaire Chesterfield. L'usine Chesterfield s'est installée sur le terrain de la Bouverie.
Cette usine fonctionne dans d'excellentes conditions ; d'ores et déjà 100 jeunes filles de Laval, dans un premier hall, y fabriquent de la lingerie fine de luxe vendue sous la marque « Lanvin ». La question est donc réglée en ce qui concerne cette première tranche et ces premiers bâtiments sont utilisés à plein.
A cette occasion, je me permets de vous faire part de la satisfaction de la Direction des usines Chesterfield quant à la qualité du personnel local ; M. Gadol, directeur général des usines Chesterfield, M. Le Théo, directeur des usines de Laval nous ont appris qu'ils étaient très satisfaits du travail des jeunes femmes et jeunes filles qu'ils trouvent à Laval. Ils s'en réjouissent bien entendu, en d'autres termes, ils ne regrettent pas, à cause de cela surtout d'avoir implanté à Laval, les usines Chesterfield.
Puis vous avez accepté, au nom de la ville, de construire pour les usines Chesterfield un second bâtiment (deux sheds) avec une formule de location-vente qui assure, pour la ville, l'équilibre financier de l'opération.
Cette deuxième tranche est en voie de construction, les charpentes sont installées et dans quelques semaines une seconde tranche de 100 ouvrières sera embauchée pour y fabriquer non plus de la lingerie mais des bas de nylon (marque Chesterfield).
Et voici une autre proposition :
Les usines Chesterfield se sont assurées pour le monde entier l'exclusivité d'une broderie Walt Disney ; des accords ont été signés avec les responsables de cette marque, vous voyez un échantillon de cette dentelle fabriquée par Chesterfield. En bref, M. Gadol qui fabrique déjà la lingerie des jeunes filles et des femmes a l'intention de fabriquer aussi la lingerie des fillettes.
Bien entendu, chacun sait que les mamans n'ont pas attendu l'installation à Laval d'une usine Chesterfield pour habiller leurs enfants, mais n'oubliez pas qu'il s'agit d'une lingerie de luxe d'ailleurs assez chère, et pour laquelle dans le monde entier il y a une nombreuse clientèle intéressée et paraît-il un peu oubliée jusqu'alors.
M. Gadol me permet de vous dire qu'il est prêt à installer à Laval une troisième usine de fabrication (4 sheds) qui occuperait 120 nouvelles ouvrières pour y confectionner cette lingerie qui serait vendue sous la marque « Chesterfield-Disney-Land », si la ville accepte de lui financer l'opération.
Si donc vous voulez bien accepter cette proposition, la délibération à prendre serait absolument identique à celle prise le 30 mai 1959, c'est-à-dire que l'opération serait une opération équilbrée pour la ville qui, empruntant les 30 millions nécessaires, serait assurée d'un remboursement annuel égal à l'annuité ; les machines seraient évidemment installées par M. Gadol et la troisième tranche de 120 ouvrières embauchée aussitôt.
Nous vous proposons de prendre la décision suivante :
La ville accepte de construire pour Chesterfield jusqu'à concurrence d'une somme de 30.000.000 de F quatre sheds de la future usine. Elle sollicite de M. le Préfet l'autorisation de traiter de gré à gré avec les entrepreneurs constructeurs de l'usine, par dérogation aux règles de l'adjudication, compte tenu du fait que les usines Chesterfield ont obtenu pour la 1ère tranche construite par elles, des prix très serrés prix que la ville ne pourrait pas même obtenir avec une adjudication. Ces sheds seraient construits sur un terrain rétrocédé à la ville par l'usine Chesterfield (plan joint au dossier).
La déclaration d'utilité publique est sollicitée pour cette opération.
M. le Maire serait autorisé à contracter près de tel ou tel organisme l'emprunt nécessaire (les délibérations réglementaires jointes au dossier). Le contrat à passer avec Chesterfield prévoirait 10 annuités de remboursement à un taux calculé en fonction du taux d'intérêt de l'emprunt qui sera consenti à la ville.
En d'autres termes, le contrat à passer avec Chesterfield assurerait pour la ville en capital et en intérêts une opération équilibrée ; la vente du terrain serait faite sous condition suspensive afin qu'elle puisse être annulée dès que les usines Chesterfield se seront libérées de la dette contractée vis à vis de la ville.
Le rapport est adopté. »
S58-U-F9 Usine Chesterfield - Nomination des architectes
« M. Le Pecq, rapporteur de la commission, donne lecture du rapport suivant :
Le conseil municipal de Laval a pris la décision de construire 6 sheds pour l'usine Chesterfield. La désignation d'un architecte est nécessaire.
Nous vous demandons de vouloir bien autoriser M. le Maire à passer avec les architectes Reby et Boyer, rue d'Amsterdam à Paris, le contrat nécessaire.
MM. Reby et Boyer seront donc maîtres d'œuvre pour ces constructions dont la ville de Laval sera maître d'ouvrage.
Le rapport est adopté. »
Source : AML 1 D 49
S84-SG- E2 Vu et approuvé : Laval, le 19 mars 1965, le Préfet : Vochel
Cession de l'usine Chesterfield : avis du conseil
« M. le docteur Raoux, rapporteur de la commission, donne lecture du rapport suivant :
La société Chesterfield a vendu l'usine de Laval à la Société Industrielle de Bonneterie, 3 boulevard du 1er R.A.M. Troyes (Aube).
Il est nécessaire que le conseil municipal intervienne pour autoriser la société à continuer le contrat passé entre la ville et la société Chesterfield.
Votre commission vous demande d'autoriser M. le Maire à donner votre accord sur ce projet.
Le rapport est adopté. »
Source : AML 1 D 51